top of page

Caractéristiques

Physico

Chimiques

Caractéristiques Physico-Chimiques des Liposomes

 

 

Nous allons maintenant étudier le comportement et les caractéristiques physico-chimiques des liposomes. Ces paramètres et ces caractéristiques sont très importants dans le comportement du liposome vis-à-vis du milieu extérieur, puisqu'il détermine sa capacité à encapsuler des médicaments et à les préserver du milieu extérieur (Perméabilité). Elles d&terminent aussi sa stabilité et sa cohésion en milieu extérieur, et enfin les méthodes de relargage du principe actif dans les zones tumorales. C’est pourquoi ces études jouent un rôle clé dans l’utilisation du liposome comme vecteur thérapeutique. Dans les bicouches des liposomes, les lipides sont soumis à de nombreuses forces qui permettent leur cohésion, une certaine mobilité ou non, une attirance ou une répulsion et enfin le caractère perméable ou non de ses membranes. Nous allons tout d’abord étudier la cohésion du liposome dans son ensemble.

 

Cohésion du liposome

 

Dans les bicouches des liposomes, les lipides sont soumis à de nombreuses forces qui permettent leur cohésion. Les phospholipides (dans le cas des membranes liposomiques) sont en effet attirés entre eux grâce à plusieurs interactions. Tout d’abord, les parties hydrophobes des phospholipides s’attirent entre elles sous l’effet de forces de Van der Waals faibles, et des non-affinités avec l’eau, ce qu’on peut appeler les « interactions hydrophobes Â». Celles-ci assurent la cohésion du liposome et elles reposent sur le fait que les parties hydrophobes, ne présentant pas d’affinité avec l’eau, cherchent avant tout à ne pas être en contact avec ces molécules, pour atteindre un état le plus stable possible. Ces interactions hydrophobes permettent donc de maintenir les phospholipides ensemble, dans la bicouche.   

 

Du côté des parties hydrophiles des phospholipides, celles-ci sont reliées entre elles par des interactions de Van der Waals fortes car leur tête est polaire et fortement hydrophile. Néanmoins, les phospholipides se repoussent entre eux par les forces de répulsion électrostatique. Si ces répulsions deviennent supérieures à celles de Van der Waals, alors le liposome se disloquera. 

 

La cohésion du liposome repose donc sur les interactions hydrophobes des queues hydrophobes (acides gras), les forces de Van der Waals entre les têtes polaires mais aussi les forces de répulsion électrostatique, et l’équilibre entre ces deux forces.

 

Cependant, d’autres paramètres primordiaux vont influencer la stabilité du liposome en milieu extérieur et la protection de la molécule encapsulée. L’un de ces paramètres est le mouvement des phospholipides au sein du liposome, appelée fluidité membranaire. Nous allons tout d’abord étudier quels sont les mouvements réalisables par les phospholipides au sein des liposomes. Nous étudierons ensuite la fluidité membranaire et les paramètres qui l'influencent.

 

 

Mobilité des phospholipides

 

 

Les phospholipides peuvent se déplacer dans la membrane du liposome. Lorsque leurs mouvements sont importants,  la membrane est très fluide, lorsqu’elle n’est pas fluide ou dite gelée, ils bougent faiblement. La fluidité de la membrane influence donc l’amplitude des mouvements réalisables par les phospholipides. Les mouvements qu’ils peuvent en effet réaliser sont de trois natures. Tout d’abord les phospholipides peuvent tourner autour de leur axe perpendiculaire au plan de la bicouche, ils tournent sur eux-mêmes. Ensuite, les phospholipides peuvent se déplacer latéralement, c’est-à-dire dans le plan de la membrane. Ce mouvement est appelé diffusion latérale ou transversale. Les phospholipides peuvent enfin passer d’un niveau de la membrane à un autre, mais ce mouvement est assez rare. Cette rotation se nomme « flip-flop Â». Les mouvements réalisables par les phospholipides sont illustrés ci-dessous.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Diffusions/Mouvements réalisables par les phospholipides dans les membranes liposomiques

 

 

La grandeur de la fluidité de la membrane influence l’importance des mouvements des phospholipides.

 

 

Fluidité membranaire

 

Les phospholipides peuvent se déplacer dans les membranes du liposome et sont toujours en mouvement. Plus la fluidité de la bicouche est importante, plus l’agitation et les mouvements des phospholipides sont importants. A l’inverse, moins la bicouche est fluide et moins les phospholipides peuvent se déplacer. Une bicouche très faiblement fluide est appelée, bicouche en phase gel.

 

Ces mouvements conduisent à désordonner la membrane du liposome et à la rendre plus instable. Plus les mouvements sont importants, plus la membrane est instable. Autrement dit, plus la fluidité de la membrane est élevée, plus celle-ci est instable. Plus elle est faible, plus la membrane est stable.

 

On distingue l’état plus ou moins ordonné de la membrane sous différentes phases, influencé par la fluidité membranaire. Ces différentes phases sont :

 

  • Une phase « cristalline Â» (Lc) où les molécules sont dans un état ordonné et la fluidité est minimale. La diffusion transversale des lipides est quasi inexistante.

 

  • Une phase gel (Lβ) où les molécules amphiphiles sont bien organisées, les interactions de Van der Waals entre les chaînes d’acides gras sont optimisées et la diffusion transversale est très faible. La fluidité membranaire d’une telle bicouche est faible.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Phase gel (Lβ)

 

 

  • Cette phase gel est obtenue après refroidissement des lipides organisés en bicouche. Les molécules sont étroitement empilées et leurs chaînes carbonées (acides gras) sont régulièrement ordonnées et peuvent être inclinées plus ou moins par rapport au plan de la bicouche. L’entropie (désordre) de cet état de la membrane est faible. Lorsque les têtes polaires sont plus volumineuses que les queues hydrophobes, les chaînes carbonées des phospholipides sont inclinées par rapport au plan de la bicouche en phase gel. Comme les chaînes des acides gras sont étirées au maximum dans la phase gel, l’épaisseur de la bicouche en phase gel (Lβ) est supérieure à celle de la bicouche en phase fluide (Lα). La densité de la phase gel est alors légèrement supérieure à la densité de la phase fluide.

 

 

  • Une phase gel ridé (Pβ) qui est similaire à la phase gel (Lβ) hormis que la bicouche présente des ondulations périodiques observables au microscope électronique. Les chaînes des acides gras des phospholipides sont inclinées par rapport au plan de la bicouche.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une phase gel ridé (Pβ)

 

  • Une phase fluide (Lα) où le désordre des chaînes d’acides gras et des lipides est élevé, où la fluidité est conséquente, et où la diffusion transversale est fortement présente. On dit que le niveau d’entropie (désordre) des chaînes d’acides gras est élevé. Cette phase est la phase que l’on retrouve principalement dans les membranes biologiques.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ces différentes phases présentent des caractéristiques différentes au niveau de l'encapsulation. Comme une phase fluide est plus instable qu’une phase gel, une phase fluide aura tendance à échapper le principe actif encapsulée tandis qu’une phase gel non. Nous allons étudier à présent l’influence de la fluidité membranaire sur la perméabilité du liposome et sa capacité à préserver le médicament encapsulé des fuites possibles et des molécules du milieu extérieur.

 

Fluidité et Perméabilité du Liposome : Capacité à préserver et encapsuler un médicament

 

Les liposomes sont tous plus ou moins perméables, c’est-à-dire que des molécules peuvent diffuser au travers de la bicouche.

 

Or le rôle d’un liposome dans la vectorisation de principes actifs est de préserver et garder le médicament sans fuite vers l'extérieu, afin de ne pas endommager les cellules saines. Un liposome perméable ne remplit donc pas son rôle.  

Le but est donc de chercher à concevoir des liposomes de faible perméabilité. La fluidité de la membrane des liposomes influence de manière conséquente la perméabilité du liposome.

 

En effet, une fluidité membranaire élevée, soit une phase fluide (Lα), est favorable à la perméabilité du liposome. Plus les phospholipides peuvent se déplacer facilement, plus le désordre de la membrane est important, et plus des espaces « vides Â» peuvent se former au sein de la bicouche. Ces espaces vides se nomment communément « pores Â». Ces pores sont l’essence de la perméabilité d’un liposome puisqu’ils permettent aux molécules du milieu extérieur/interne de pénétrer dans le liposome ou de s’échapper de celui-ci. Le nombre de ces pores et la fréquence de leur apparition augmente significativement avec une membrane fluide. Plus une membrane est fluide, plus elle est donc perméable.

 

Au contraire, lorsqu’une bicouche lipidique est en phase gel (Lβ), très peu de pores apparaissent et le risque de fuite du principe actif est donc fortement diminué. Sa perméabilité est faible.

 

En outre, les molécules de faible taille pénètrent davantage dans les liposomes que les grandes. Dans le cas des molécules ioniques, les mécanismes d’absorption et de désorption (sortie d’une membrane) sont plus compliqués et dépendent de manière importante de la charge de la membrane (charge des têtes des phospholipides), de la polarité des phospholipides et du PH des milieux (internes/externes) du liposome. 

 

L’épaisseur de la membrane influence également la perméabilité. Une membrane épaisse défavorise l’apparition de pores et la diffusion de molécules au sein de la membrane (pénétration ou fuite). A l’inverse, une membrane fine favorise la perméabilité de la membrane et du liposome. 

 

L’épaisseur d’une membrane se caractérise par la taille des phospholipides employés. Des phospholipides avec de longs acides gras (longues chaînes carbonées) donneront lieu à une bicouche épaisse. Le nombre d’atomes de carbone possédés par les acides gras influencent donc la perméabilité d’un liposome. 

 

En outre, nous avons vu que l’épaisseur était aussi influencée par la fluidité de la membrane. En effet, une membrane dont les phospholipides sont désordonnés sera plus fine.

 

La dégradation des liposomes (hydrolyse) in vivo influence aussi la perméabilité de leur bicouche lipidique.

 

Comme la fonction première d’un vecteur thérapeutique est d’acheminer une molécule médicamenteuse vers les zones malades sans la libérer en chemin et au mauvais endroit, tout en la préservant des atteintes du milieu extérieur comme le sang, il est crucial de développer des liposomes dont la perméabilité et la fluidité sont faibles.

 

Dans l’optique d’élaborer de tels liposomes, il convient de connaître les facteurs qui influencent la fluidité membranaire des liposomes. La nature des acides gras, la température et la présence de cholestérol sont des paramètres qui influencent la fluidité et sont donc à prendre en compte lors de la conception d’un nanovecteur thérapeutique liposomique.

 

Facteurs de Fluidité et de Perméabilité

 

La nature des acides gras

 

L’organisation ordonnée ou désordonnée de la bicouche d'un liposome est influencée par la forme des chaînes carbonées des acides gras et leur nature. En effet, si les deux acides gras d’un phospholipide sont droits, ils seront bien ordonnés entre eux et la fluidité de la membrane sera faible (ordonnée). Elle tendra vers une phase gel. Au contraire, quand les acides gras ou l’un des acides gras est courbé, l’organisation des queues hydrophobes des phospholipides sera désorganisée et la fluidité membranaire plus élevée.

 

La géométrie des acides gras comme sa courbure ou sa droiture, est assurée par le nombre de doubles liaisons présentes dans l’acide gras et l’isomérie de ces doubles liaisons. Un acide gras dont la chaine carbonée présente une double liaison d’isomérie cis sera courbé. Cette courbure engendre un mauvais alignement des phospholipides entre eux, la membrane est fluide. C’est le cas du phospholipide illustré ci-dessous qui possède un acide gras saturé (pas de double liaison) et un acide gras monoinsaturé (une double liaison) d’isomérie cis.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour un phospholipide possédant deux acides saturés ou un acide gras saturé et un acide gras insaturé de doubles liaisons d’isomérie trans, ses deux acides gras seront alignés entre eux. La membrane ne sera pas fluide. Cette configuration est illustrée ci-dessous.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’impact de la nature des phospholipides est vraiment mis en valeur dans l’illustration suivante.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le nombre de doubles liaisons et l’isomérie de ces doubles liaisons influencent donc la fluidité membranaire de la bicouche du liposome. Les insaturations et les isoméries cis augmentent la fluidité membranaire, tandis que les saturations et les isoméries trans diminuent la fluidité membranaire.

 

Dans le but de créer des liposomes stables et perméables, il faut donc plutôt utiliser des acides gras saturés ou mono-insaturés de doubles liaisons trans. Cependant, les isoméries trans sont rares et les acides gras sont souvent composés de doubles liaisons d’isomérie cis.

 

Néanmoins, ce ne sont pas les seuls facteurs de fluidité, les paramètres de température influencent également la fluidité et la perméabilité des liposomes.

 

La Température

 

La température de la bicouche des liposomes influence considérablement l’état de la bicouche lipidique. En effet, plus la température est élevée, plus les phospholipides acquièrent de l’énergie et plus leur mobilité est importante. Aussi, plus le désordre et la fluidité de la membrane augmentent, plus la bicouche est fluide. Par conséquent, plus la température est élevée, plus la fluidité membranaire est élevée et plus la perméabilité du liposome est importante.

 

A l’inverse, plus la température du liposome est faible, plus l’énergie des phospholipides est faible et plus leur dynamisme est faible. Plus le désordre et la fluidité de la membrane sont faibles, plus la membrane tend vers une phase gel (Lβ) ou dans le meilleur des cas, vers une phase cristalline (Lc).

 

L’évolution de la fluidité de la membrane et des phases de fluidité (cristalline, gel, gel ridé, fluide) varie donc en fonction de la température. La température à laquelle la membrane passe d’un état ordonnée (phase gel) à un état désordonné (phase fluide) s’appelle température de transition de phase et elle se symbolise par Tm (melting temperature).

 

Ainsi lorsque la température de la bicouche et du liposome est inférieure à Tm, la membrane est en phase gel. Lorsque la température de la bicouche est supérieure à Tm, la membrane est fortement fluide. Il arrive que la membrane passe par la phase gel ridé (Pβ) entre la phase gel (Lβ) et la phase fluide (Lα). Cette phase n’est pas présente pour tous les phospholipides. L’illustration suivante illustre l’évolution des phases de membranes en fonction de la température.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Evolution de la fluidité membranaire illustrant la Tm, avec l'augmentation de la Température

 

 

Dans l’illustration suivante, les phases de la membrane sont illustrées en fonction du rapport entre la température de la bicouche et la Tm.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Phases de la membrane lipidique en fonction de la température et la Tm

 

 

 

Dans le but de créer des liposomes stables et le moins perméables possible pour encapsuler des médicaments, il est préférable d’obtenir une Tm élevée pour éviter que la membrane soit fluide (phase fluide) et fortement perméable.

 

Plusieurs paramètres influencent la Tm comme la nature des acides gras, le nombre de doubles liaisons. Ainsi nous allons Ã©tudier l’influence des acides gras sur la Tm.

 

Acides gras et température de transition de phase (Tm)

 

La Tm des membranes dépend en partie de la nature des acides gras. En effet, elle évolue en fonction de la facilité ou la difficulté des phospholipides à se mouvoir dans la membrane. Plus les phospholipides se déplacent facilement (fluidité), plus il sera facile à la bicouche d’être fluide, la température nécessaire à la transition vers cette phase sera basse. A l’inverse, moins les phospholipides peuvent se mouvoir facilement, plus il faudra de l’énergie et de la température pour qu’ils puissent se déplacer, et que la membrane soit fluide. La température nécessaire à l’obtention d’une membrane fluide sera plus élevée.

 

Nous avons vu que le nombre de doubles liaisons et les isoméries des acides gras influencent la fluidité de la membrane. Plus les acides gras présentent de doubles liaisons (insaturations) d’isoméries cis, plus la fluidité membranaire est importante et plus les acides gras ne possèdent pas de doubles liaisons ou possèdent des doubles liaisons d’isomérie trans, la fluidité membranaire est faible. Ainsi, plus les acides gras sont insaturés avec des doubles liaisons d’isomérie cis, plus Tm sera basse et plus ils seront insaturés et présenteront des doubles liaisons d’isomérie trans, plus Tm sera élevée.

 

Toujours dans le but d’obtenir des liposomes de faible perméabilité et de faible fluidité, il est plus intéressant d’utiliser des phospholipides possédant des acides gras avec peu de doubles liaisons cis.


L’évolution de Tm en fonction du nombre de doubles liaisons est illustrée en suivant. L’illustration illustre les résultats d’une expérience de mesure de Tm en fonction du nombre de doubles liaisons de deux acides gras identiques, composant une phosphatidylcholine (PC).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Evolution de Tm en fonction du nombre de doubles liaisons présentes dans deux des chaines d'acides gras identiques

 

D’après ce graphique, on peut observer que Tm diminue de 50° C à -20° C lorsque les acides gras ont une double liaison, soit une diminution de 70° C. On peut voir que Tm diminue ensuite de -20° C à -55° C avec l’ajout d’une nouvelle double liaison, puis diminue encore de -55° C à -60° C avec l’ajout d’une double liaison, soit pour 3 doubles liaisons sur chaque chaine d’acides gras.

 

L’expérience a également été réalisée avec des (PC) comportant un acide gras stéarique (18 : 0) et un acide gras insaturé contenant de 0 à 6 doubles liaisons. Les résultats de l’expérience sont illustrés dans le graphique suivant.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Graphique représentant l'évolution de la Tm de la bicouche en fonction du nombre de doubles liaisons présentes dans l'acide gras insaturé des PC, composées d'un autre acide gras stéarique (18 : 0)

 

 

D’après ce graphique, on peut voir que la Tm diminue de 55° C à 0° C avec l’ajout d’une double liaison. L’ajout d’une seconde double liaison fait encore diminuer Tm de 0°C à -15°C. Les ajouts supplémentaires de doubles liaisons n’entrainent plus de baisse significative de la Tm de la bicouche, et la Tm reste stable, même légèrement croissante.

 

On peut voir que les diminutions de Tm en fonction du nombre de doubles liaisons est considérable. Toujours dans le but d’élaborer un liposome comme vecteur de principes actifs, il est alors impératif d’utiliser des acides gras saturés, ou insaturés avec très peu de doubles liaison, ou avec des doubles liaisons d’isomérie trans. Néanmoins, l’ajout de cholestérol permet de diminuer de manière considérable la fluidité de la membrane pour la maintenir à une fluidité stable et à peu près constante, indifféremment de la Tm. C’est le dernier paramètre de la perméabilité que nous allons étudier.

 

 

Cholestérol et Fluidité membranaire

 

La fluidité membranaire du liposome est un frein à sa bonne utilisation en tant que vecteur thérapeutique puisqu’elle favorise sa perméabilité et son instabilité.

 

Afin de réduire le désordre des phospholipides et la fluidité d’une bicouche lipidique d’un liposome, on peut insérer des autres molécules qui vont servir de stabilisateur et de consolidateur dans la membrane ou la bicouche. C’est le rôle des cholestérols qui permettent d’ordonner la bicouche et de la maintenir dans un état stable, de faible fluidité.

 

Les cholestérols sont naturellement présents dans les membranes biologiques comme dans celles des hématies (globules rouges). Le schéma suivant illustre la composition de la membrane plasmique d’une hématie (globule rouge).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Schéma de la composition d'une membrane plasmique d'hématie (globule rouge)

 

 

De la même manière que les membranes plasmiques biologiques, les bicouches des liposomes peuvent comporter des cholestérols afin de minimiser la fluidité et la perméabilité de la membrane.

 

Le cholestérol, lipide de la famille des stérols, est une molécule amphiphile composée de cycles. De la même manière que les phospholipides, les cholestérols s’intercalent parallèlement aux phospholipides des bicouches en dirigeant leur partie polaire à côté des têtes polaires des phospholipides, et leur partie apolaire à côté des chaînes hydrophobes des phospholipides.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Schéma d'une membrane composée de phospholipides et de cholestérol

 

 

Le cholestérol permet d’ordonner les lipides et de diminuer leurs mouvements. Il diminue la fluidité et la perméabilité membranaire.

 

Influence de la présence du Cholestérol et Fluidité

 

Dans une membrane en phase gel (en dessous de Tm), le cholestérol en faible concentration tend à augmenter le désordre des phospholipides, au niveau des chaines carbonées des acides gras. Dans de faible concentration, il augmente donc la fluidité d’une membrane gel. Cepedant, dans des concentrations de 30% le cholestérol permet d’ordonner les phospholipides et les chaînes carbonées, la membrane devient mieux ordonnée avec l'ajout de cholestérol. La membrane devient moins fluide et sa fluidité est intermédiaire à la phase gel et fluide. La phase intermédiaire se nomme (Lo), elle est illustrée ci-dessous.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Schéma de la phase (Lo) avec des cholestérols, et des phases gel et fluide

 

 

Lorsque la phase de la bicouche est la phase fluide (au-dessus de Tm), le cholestérol organise les phospholipides et la membrane devient donc moins fluide. La fluidité de la membrane diminue très fortement pour rejoindre celle de la phase (Lo).

 

Lors de l’ajout de cholestérol, la température de transition de phase disparaît car le cholestérol assure une fluidité stable dans une large gamme de température. La phase (Lo) est stable au niveau de sa fluidité, en fonction de la température. Le cholestérol assure une faible fluidité dans une gamme d’environ 50°C avant de commencer à varier.

 

L’évolution de la fluidité avec l’ajout de cholestérol est illustrée ci-dessous.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Evolution de la fluidité avec l'ajout de Cholestérol

 

 

L’ajout de cholestérol permet donc de diminuer la fluidité et la perméabilité membranaire d’un liposome. Dans le souhait de formuler un liposome comme vecteur de principe actif, l’insertion de cholestérol est donc importante et recommandée.

 

La stabilité chimique du liposome dépend de sa fluidité, mais aussi des éléments extérieurs aux liposomes qui peuvent l’endommager. Comme le rôle d’un liposome en tant que vecteur de principe actif est de protéger et préserver son médicament du milieu extérieur, il doit être capable de résister aux forces extérieures et possibles dégradation in vivo comme les réactions d’hydrolyse. Nous allons maintenant étudier les réactions d’hydrolyse qui peuvent détérioré la bicouche des liposomes, provoquant des fuites et une perméabilité importante, voire même la destruction du liposome.

 

Les réactions d’hydrolyse

 

L’hydrolyse peut également « attaquer Â» et endommager l’intégrité et la stabilité des bicouches, quitte même à provoquer leur dislocation.

 

Une hydrolyse correspond à la « décomposition Â» d’une substance grâce aux éléments dissociés de l’eau, c’est-à-dire les ions H+ et OH- . Lors d’une hydrolyse, il y a rupture de liaison par l’eau. Par exemple, la réaction d’hydrolyse du propanoate de méthyle s’écrit :

 

CH3−CH2−CO2−CH3 + H2O = CH3−CH2−CO2H + CH3OH

 

Elle conduit à la formation d'acide propanoïque et de méthanol, la liaison entre le CH3 et le reste de la molécule de propanoate de méthyle est ici rompue par la réaction d’hydrolyse. La réaction d’hydrolyse est l’inverse de la réaction d’estérification.

 

Les liaisons esters présentes dans un phospholipide peuvent subir une hydrolyse dans les solutions aqueuses. En effet, les carboxyles esters s’hydrolysent plus rapidement que les phosphates esters. C’est-à-dire que les liaisons esters qui relient les acides gras au glycérol peuvent être plus rapidement hydrolysées que les liaisons esters entre le glycérol et le phosphate. Nous avons entouré dans la formule topologique ci-dessous d’une phosphatidylcholine, les liaisons concernées par la réaction d’hydrolyse.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Formule développée d'une phosphatidylcholine schématisant les liaisons hydrolysables

 

 

Les liaisons esters hydrolysables en premier lieu sont entourées d’un cercle rouge, ce sont les liaisons carboxyles esters et phosphates esters. Ainsi, après l’hydrolyse de ces liaisons esters, le ou les deux acides gras sont libres et ne sont rattachés au glycérol. Le phospholipide ainsi formé est un lysophospholipide car il ne possède plus d’acides gras. 

 

La vitesse d’hydrolyse est également dépendante du pH, elle est minimale à un pH neutre (7) et augmente à des pH acides et basiques. La vitesse d’hydrolyse est aussi influencée par la température, elle est en effet plus lente à de faibles températures aux alentours de 4°C. Le pH physiologique est de 7,4, donc la vitesse d’hydrolyse sera un peu importante mais elle sera surtout déterminante aux alentours des tumeurs puisque leur pH peut atteindre 5, donc acide. 

 

In vivo, l’hydrolyse des phospholipides a lieu par les phospholipases dont tout particulièrement la phospholipase (PLA2). Elle hydrolyse les phospholipides surtout au niveau de la liaison carboxyle ester en position (2) du glycérol, provoquant alors la séparation de l’acide gras lié au glycérol par cette liaison. Elle induit donc la libération d’un acide gras libre et donne un lysophospholipide.

 

Phospholipases

 

Les phospholipases sont des enzymes qui peuvent hydrolyser les phospholipides. Il existe plusieurs phospholipases répertoriées ci-dessous.

 

  • Phospholipase (PLA1) : Hydrolyse la liaison ester carboxyle entre la chaine acyle et le glycérol en (1), libérant ainsi un acide gras et un 1-lysophospholipide.

 

  • Phospholipase (PLA2) : Hydrolyse la liaison ester carboxyle entre la chaine acyle et le glycérol en (2), libérant ainsi un acide gras et un 2-lysophospholipide.

 

  • Phospholipase B (PLB) : Hydrolyse les liaisons carboxyles esters des deux chaines acyles et du glycérol.

 

  • Phospholipase C (PLC) : Hydrolyse la liaison phosphate ester du glycérol et du phosphate, libérant un phosphate et un glycérol diglycéride (relié à deux acides gras).

 

  • Phospholipase D (PLD) : Hydrolyse la liaison phosphate ester entre le phosphate et l’alcool supplémentaire, libérant alors un  acide phosphatidique et l’alcool supplémentaire en question.

 

Les différentes zones d’action des phospholipases sont illustrées dans le schéma d’un glycérophospholipide suivant :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Représentation des zones d'action des phospholipases sur un phospholipide

 

Nous pouvons voir sur le schéma suivant les différentes zones d’actions des phospholipases. Ainsi en plus des risques d’hydrolyse naturelle dans le milieu sanguin, dans les cellules, les enzymes phospholipases peuvent hydrolyser les phospholipides constituant les membranes et endommager les liposomes.

 

 

 

 

bottom of page